POUR LES YEUX FERMES

"Pour les yeux fermés" est le deuxième spectacle de l'Ensemble Philharmonique de Création Radiophonique.
Il s'agit d'une adaptation des "Contes pour les yeux fermés" de Alphonse Séché, publiés une première fois au début de ce siècle en 1905.
Ces contes sont d'étonnantes transcriptions de rêves acides et savoureux, étranges comme il se doit. Leur modernité étonne et fait penser que Séché fût l'un des précurseurs solitaires et visionnaires de Dada et du Surréalisme.
Parmi les trente contes, on a choisi ceux qui sont le plus propices à produire des images sonores que l'on extraira et que l'on interprétera sur scène.

"Contes pour les yeux fermés" est un ouvrage de jeunesse de Alphonse Séché.
Né à Nantes en 1876, il a débuté sa carrière en tant que journaliste au "Siècle" puis a par la suite fondé une revue "La critique indépendante", et a participé en tant que critique à d'autres revues. Il a également publié plusieurs recueils de poésie qui ont eu un grand succès, sans lendemain. Il a surtout par la suite été essayiste, et a publié des ouvrages d'histoire et de politique, notamment une "Histoire de la nation juive" en 1939 dans laquelle il exprime des positions nationalistes et les mythes antisémites d'alors. Après la guerre 39/45, et à cause de cette publication commence pour lui une période de purgatoire dont il n'est plus sorti, bien qu'il ait continué de publier jusqu'à sa mort en 1964.

Pour ses contemporains, les contes pour les yeux fermés sont à classer dans le domaine du fantastique, et parmi les critiques d'alors, les références sont faites à Poe, Goya, Apollinaire, et on y voit des histoires bizarres, un peu horribles, qui font peur même.

Ce qui frappe dans ces contes, c'est l'innocence qui s'en dégage, et qui cohabite avec une crudité du verbe. Ceci est dû à la méthode d'écriture adoptée par Alphonse Séché, une tentative de photographie de ses rêves, sans restriction, et alors qu'il ignorait les travaux de Freud, et ce qui allait devenir le surréalisme. "Tel Mr Jourdain, dès 1905, j'avais fait du surréalisme sans le savoir dans les contes pour les yeux fermés" (A. Séché 1926).

Pour cette adaptation sonore, nous allons tâcher de conserver cet aspect fantastique et étrange, grâce à la musique interprétée en direct, mais aussi pré-enregistrée. Les sons de bruitages seront réalistes, ou pas. Il s'agira de continuer le travail sur la distorsion de la perception de la réalité déjà amorcé dans notre précédente adaptation de "L'amateur de corsets" de Oskar Panizza.
Car n'y-a-t-il rien de plus réaliste qu'un rêve lorsqu'on le fait?
Sauf que lorsqu'il s'agit de le raconter, alors on se retrouve confronté au décalage qu'il y a entre cette réalité et l'autre, celle du "maintenant que l'on est réveillé". Peut-être est-ce pareil lorsque l'on se met à vouloir raconter des histoires grâce à la radio. Car, on le sait bien dans cette discipline: à l'écoute, rien n'est moins réaliste que la réalité elle-même et c'est en trichant que l'on obtient les meilleurs rendus sonores. Bricoler le son, trafiquer l'écoute, encore une fois c'est ce que l'on fera; mais pour une fois, ce ne sera pas dans l'intimité secrète du studio, mais sur la scène de la salle de spectacle.

L'émission-spectacle est bâtie comme un parcours onirique dans lequel les auditeurs retrouvent comme points de référence fictionnelle les dialogues dit par nos deux comédiens qui endossent différents personnages, selon les situations. Les passages entre diverses situations sont rendus grâce au son et à la musique.